Confessions d'un imbécile

Journal d'un Parisien trentenaire

mercredi, mars 21, 2007

LA FEMME PARFAITE ? 2/4


Samedi

Le deuxième baiser de Sophie est plus crispé. Je suis déçu car il n’y a pas de magie, pas de perfection. Il y aura donc 2 taxis et Sophie rentrera seule à Nation. Chose pensée, chose faite.
De retour chez moi, je suis énervé et déçu de la conclusion de cette soirée en queue de poisson. Je bois quelques bières suivies d’un whisky en comatant devant un match de Basket NBA diffusé sur C+ et je pars me coucher, vers 4H00, bourré et bougonnant.

Le téléphone me réveille vers midi. Je décroche la tronche enfarinée. Aurélie. Une ancienne collègue, de l’époque où j’étais consultant à la Société Générale, jolie, vive d’esprit quoique très conservatrice et connotée bourgeoisie locale, avec qui je dois partir faire une semaine de tourisme en Italie le lendemain. Ceci en vertu d’un “ gentleman agreement ” qui nous permettra de gérer au mieux cette situation de concubinage en toute camaraderie. Enfin on verra bien sur place …
Elle m’informe qu’elle sera dans le quartier vers 14H00 et me propose de prendre un café afin de discuter des dernières modalités du voyage. J’accepte et de ce fait il me reste moins de 2 heures pour me mettre dans le sens de la marche.

Arrivé au café, rue du Commerce, entre 2 sourires charmeurs au garçon de café, Aurélie étale un grand nombre de guides touristiques sur Rome, Bologne (notre aéroport d’atterrissage) et la Toscane. Elle semble avoir déjà planifié le voyage. Ca commence bien ! Elle a également décidé que nous irions à l’aéroport en bus et que pour cela il faut nous retrouver à Opéra à 10H00 demain matin. Je n’aime pas le bus. Ca continue très fort. Comme je lui rappelle, que je fête les 30 ans d’une copine (Vanessa) ce soir avec sortie en boîte à la clé, elle fronce les sourcils et précise qu’elle m’appellera demain à 9H00 histoire de confirmer la sonnerie de mon réveil. Ca se poursuit dans un état d’esprit toujours aussi serein. Je la rassure néanmoins en précisant que je serai raisonnable et que je serai couché pour 3H00, tout en sachant au fond de moi que comme il y aura désormais 2 sonneries de réveil, il y aura 9 chances sur 10 pour que je sois déraisonnable et que je ne m’impose aucun couvre-feu.

Après 2 cafés serrés nous nous quittons en nous donnant rendez-vous le lendemain matin et je réalise que, toute jolie qu’elle soit, je n’ai plus trop envie de survoler les Alpes en sa compagnie.
Du coup je poursuis l’après-midi par une séquence de shopping compulsif rue du Commerce histoire de calmer mon angoisse. Je craque pour un perfecto tout en étant à 2 doigts d’emballer la vendeuse dans le mouvement, une black rondelette avec des lentilles de contact bleues. Puis je vais acheter une bonne bouteille de champagne, pour un apéro programmé en début de soirées avec d’ex collègues, période IBM cette fois, alors qu’un pack de 16 aurait suffi à leur bonheur.
Je rentre chez moi plein d’entrain, commence à préparer mon sac de voyage, m’affale sur le lit et m’endors. Le téléphone me réveille à nouveau. Certains jours je m’estime chanceux que des gens m’appellent pour limiter mes heures de sommeil. C’est Vanessa. A la fois stressée et pompette, elle m’invite à être ponctuel au Cabaret, un resto-club “ hype ” place du Palais-Royal à 21H30. Là-bas on ne plaisante pas avec les horaires de réservation précise t’elle. Je regarde ma montre : 20H00 ! C’est pas ce soir que la bouteille de champ’s sera attaquée. Pas d’apéro IBM.
J’enfile mon perfecto nouveau et direction Cabaret.

Arrivé sur place à l’heure prévue je commence à prendre la mesure du traquenard qui m’attend.
Le Cabaret est un endroit branché au décor propre et fade, probablement créé par un architecte Finlandais. Des serveuses à la plastique irréprochable mais aussi froides que les tables en aluminium qui les entourent et aussi maquillées qu’une voiture volée. Bref tout ce qu’aimerait Fabien, ex-roi de la nuit, mais tout ce que je déteste : ce n’est vraisemblablement pas dans ce genre d’endroit qu’on peut embrasser une fille en écoutant du Pierre Bachelet (…je m’expliquerai dans le 3ème chapitre sur ce point). Deuxième constatation il n’y a pas de réservation au nom de Vanessa et, après que le physionomiste m’ait longuement dévisagé, je suis autorisé à descendre au bar du sous-sol pour essayer de repérer des visages connus.

Arrivé au sous-sol, je me dirige vers le bar, également désigné selon toute probabilité par un Finlandais, mais cette fois-ci à tendance gothique, et c’est ici que je reconnais Julie, une amie de Vanessa, magnifique femme brune d’1m80 au physique de modèle, professeur d’histoire-géographie en lycée, récemment divorcée. Elle vient à ma rencontre, me salue et dit : “ Je parie que tu ne te souviens plus de mon prénom ! ”. “ Non, pas du tout, Julie… ” et je me retiens d’ajouter “ …même un moine gay et amnésique s’en souviendrait. ”
Elle se lance alors dans un long monologue plein de stress pour m’expliquer que l’organisation est complètement catastrophique ce soir, que nous n’avons pas de réservation et qu’on va galérer pour dîner à une vingtaine de personnes dans le quartier, que Vanessa n’est toujours pas là, alors qu’elle nous a expressément demandé d’être ponctuels et qu’en plus quand elle lui a parlé au téléphone, elle avait l’air complètement stone et que quand elle était petite c’est sa maman qui organisait les anniversaires de Vanessa et qu’au moins c’était bien fait etc...
Ouffff !

A ce moment là je me suis demandé si le doublement du chromosome X, doublait aussi les facultés organisationnelles. Alors je me suis alors dirigé automatiquement vers le bar pour commander une bière, j’ai sympathisé avec Ralf, un Allemand de la Weser, et par dépit j’ai parlé football et du pied gauche de Johan Micoud.
Vanessa est finalement arrivée à la 2ème bière alors qu’on en était à parler des chances la Tchéquie à l’Euro2004, pour constater le marasme organisationnel. Elle avait l’air effectivement éméchée car elle était super-heureuse que je lui offre un DVD de “ La Tour Montparnasse infernale ”.
Les choses s’arrangent en partie lorsque le staff du Cabaret nous dégotte une table pour 14 alors que nous sommes 18. Les négociations s’engagent alors pour les 4 places restantes. Comme la population des amis de Vanessa, très en harmonie avec le décorum local pour la plupart, ne me séduit guère et que je n’ai pas envie de passer trop de temps dans cet endroit je propose d’aller manger un poulet-frite à coté avec 3 autres personnes. De préférence avec une majorité de jolies filles, ajoutai-je par voie télépathique.
Ma solution semble retenir l’intérêt de Julie, prête à se sacrifier pour sauver le dîner d’anniversaire de sa copine, de Marine, une amie d’enfance de Vanessa, que j’ai brièvement connue à Tokyo et de Sofia, une amie Londonienne de Marine.

Mon vœu est donc exaucé à 100% et alors que nous nous dirigeons vers la sortie le chef de rang nous informe qu’il vient de nous trouver une table pour 4 à l’étage.
Nous nous attablons donc et je constate à nouveau, avec plaisir et avec la fierté du coq de basse-cour, que je suis entouré de 3 jolies femmes qui commencent à se détendre. Cette situation n’est que provisoire puisque Marine a appelé une amie Russe, Héléna, qui débarque quelques minutes plus tard et vient s’installer à ma gauche assise, sur un tabouret.
Cette soirée, au démarrage poussif, s’engage de mieux en mieux d’autant plus que je me retrouve maintenant pris en plein milieu d’un “ dîner copines ”.

Après la 1ère bouteille de Pouilly Fuissé LaDoucette, le débat s’anime sérieusement. Tout d’abord avec ma voisine de droite, Sofia, très jolie femme aux cheveux châtains courts, yeux noisettes et perçants, sourire ravageur et qui s’occupe d’éco-tourisme.
Bien qu’elle parle un Français quasi-parfait, je m’étonne qu’elle ne connaisse pas certaines expressions françaises clés tel que “ happy-hours ”. Elle m’avoue alors qu’elle est Italo-suisse.
Coïncidence, ou presque, je lui dis que je pars demain en Italie.
“ - Où ça ? me demande t’elle
- Rome - Génial. J’ai grandi à Roma. C’est une ville magnifique et incroyablement romantique. Tu pars seul ?
- Pourquoi cette question ?
- Parce que si tu pars en couple, tu vas succomber et en revenir follement amoureux. Alors tu pars seul ?”
Au vu de ce que j’avais expérimenté dans l’après-midi j’avais de sérieux doutes sur ma prédisposition au romantisme Romain. J’hésite sur la réponse à donner. Info ou intox ? Info : je réponds d’un “ non ” hésitant à sa question.
Elle insiste.
“ - Tu pars avec ta copine ou ta fiancée ?
- Pas vraiment, dis-je toujours hésitant … ”
Sentant que j’ai piqué sa curiosité et pour devenir encore plus intéressant, je choisis spontanément l’option intox et je sors :
“ - En fait je pars avec une ex-copine. On a acheté les billets depuis longtemps et on a décidé de partir malgré notre rupture.
- Tu es sur de ce que tu fais ? Si tu pars avec ton ex, je suis sure que vous allez vous remettre ensemble à Rome. Mais peut-être que c’est ce que tu cherches. Rome, c’est le cadre idéal pour ça. D’ailleurs je te parie que tu reviens follement amoureux d’Italie.
- Tenu ! je réponds. Qu’est ce qu’on parie ?
- Un poulet-frite, claque t’elle avec a propos. ”
Excellente idée et en plus, une fois revenu de la ville éternelle, ça me donnera une occasion potentielle de rester en contact avec cette femme qui captive toute mon attention.

On s’en donne donc cinq et mon attention bien qu’attirée sur ma droite se porte alors brusquement sur les trois autres “ copines ” qui ont commencé à parler “ mecs ” sous l’impulsion d’Héléna.
Héléna est une slave (donc blonde) bien en chair, violoniste de son métier, qui se la joue mangeuse d’homme.
Elle a commencé depuis quelques minutes à raconter son existence romanesque du style : “ Mon précédent mec, c’était un pianiste très célèbre en Russie. On s’est rencontré dans une soirée à L.A. Il a flashé sur moi et réciproquement. Voyant cela, il m’a dit que j’avais 5mn pour me décider à le suivre à l’aéroport et prendre un avion pour Miami. J’ai dit BANCO. Arrivée là-bas ça a été l’amour fou jusqu’au jour où il m’a annoncé qu’il s’était fait ligaturé les trompes des testicules (sick). Il ne voulait pas d’enfants. Je l’ai quitté. ”
Et puis elle continue en assénant : “ Je suis amoureuse de mon mari. En plus il est riche et il baise bien. Mais si un jour le sexe ou l’argent vient à manquer je vais voir ailleurs. Sans nécessité de divorce, bien sur, si c’est juste une question de sexe. ”
Cruauté de la nature féminine…surtout en Europe de l’Est suis je en train de penser. En fait Julie, enhardie par les propos d’Héléna, me fait découvrir que je pense mal. Elle nous raconte la richesse de sa vie sentimentale du moment : “ Je suis avec un mec très riche en ce moment.
Je ne suis pas très amoureuse mais il me gâte tellement que ça me convient tout à fait. Le week-end dernier, il m’a emmené en week-end à Courchevel. Chambre d’hôtel à 640€ la nuit. C’était génial. ”
Marine qui branchait un pianiste, collègue d’Héléna qui était au bar de la disco du Cabaret, au moyen de SMS plus crus les uns que les autres, lève la tête et ajoute en souriant : “ C’est pour ça que tu as envoyé ce SMS à tout le monde la semaine dernière. Ca disait : 640€ la chambre, qui dit mieux ? ”.
Les femmes sont peut-être tout aussi vénales en Europe de l’Ouest pensais-je et la beauté de l’âme féminine telle qu’elle était dessinée dans mon esprit commençait à s’assombrir peu à peu à lumière de ces discours.
Et bientôt, ce qui allait s’effriter c’était mon espoir de voir naître une petite idylle de cette soirée.

En effet, Marine émerge définitivement de son GSM et commence à traquer Sofia : “ D’ailleurs toi aussi Sofia tu devrais aller voir ailleurs et te trouver un amant. Je suis sure que ton mari te trompe lors de ses incessants déplacements à Amsterdam. ”
Mariée !
Une fille qui ne porte même pas d’alliance. Décidément de nos jours la signalétique part à vau l’eau. Cette révélation me porte un coup fatal et pendant ce temps là Sofia se défend mollement : c’est juste une petite crise normale après 4 ans de mariage.
Ce moment marquera un tournant de la soirée.

La 2ème bouteille de Pouilly Fuissé étant sur le point de se terminer, les conversations du repas s’essoufflaient, Vanessa et Noriko étaient venues gonfler la population féminine, mais Helena m’avait relégué sur le tabouret à la défaveur d’une excursion aux toilettes, le dessert s’était révélé médiocre, Julie était partie prématurément pour cause de baby-sitter peu noctambule et l’addition s’était avérée aussi salée que le plat du jour.
Nous redescendions donc, elles et moi, au sous-sol direction la discothèque et le dance-floor pour elles et le bar ou la table garnie de vodka et tonic pour moi.
Puis, devant le manque de conversation de mes voisins désormais trop bourrés pour parler foot, je décide d’aller gigoter à mon tour sur la piste. La musique est naze. De la techno, style café Coste, Helsinki mix. La piste est remplie de top-models, siliconées pour les unes et gominés et body-buildés pour les autres. J’ai l’impression d’être au milieu d’un mauvais clip M6 Music.
Je me décourage au bout d’1/4 d’heure et pars faire le tour du club histoire de rencontrer quelqu’un.
J’ai l’impression d’être seul dans toute cette foule si différente.
Finalement je tombe sur Noriko, pas en grande forme. La preuve elle m’offre la fin de son whisky-coke. Je le descends d’un trait. Je regarde ma montre. 2H00. Je me dis qu’il y aura finalement un couvre-feu ce soir.
Je décide de faire un dernier tour de Cabaret, dans le sens inverse cette fois, histoire entre autre de retrouver Vanessa et de la saluer avant de sauter dans un autre taxi.
Le taxi du dimanche matin, succédant au taxi du samedi matin.
Encore une soirée qui risque de se terminer en queue de poisson.


A suivre…