Confessions d'un imbécile

Journal d'un Parisien trentenaire

mercredi, mars 21, 2007

LA FEMME PARFAITE ? 1/4

Paris – vendredi 5 mars 2006 – 20H30

Sophie

J’ai rendez-vous sur la Butte aux Cailles et je suis un peu retard. Il m’a fallu une paire d’heures pour digérer un déplacement professionnel dans la froideur Mulhousienne et je me suis mis en route sans trop d’entrain.
Pourtant de l’entrain je ne devrais pas en manquer étant donné que j’ai rendez-vous avec la craquante Sophie. Sophie un petit format tout en rondeurs sobres et avec de superbes yeux gris bleus mais sa petite voix et ses histoires un peu banales ne m’enthousiasment guère. Seulement j’ai négocié ce rendez-vous alors je m’y rends et je m’automotive sur le chemin tant et si bien que lorsque je suis arrivé au lieu de rendez-vous je suis quand même un peu nerveux et intimidé.

Après les salutations et banalités d’usage il nous faut déterminer le restaurant et là 1ère surprise : la neutre et a priori conformiste Sophie choisit " Le temps des cerises ", un resto coopératif ou on mange une cuisine familiale correcte mais roborative dans une ambiance de proximité bruyante, enfumée.
Une fois entré dans ce lieu animé je demande une table non-fumeur car ma compagne est patchée. Le serveur nous présente une table à l’écart, dans un coin archi-calme … à coté d’un congélateur. Moue sceptique de Sophie. J’en pense autant et j’ose : " On va avec les fumeurs ? " et là 2ème surprise : un oui franc et massif.

J’interpelle le serveur et je lui dis " Désolé, on a changé d’avis : on vient d’enlever les patchs ". Il sourit. Elle aussi. Et il nous présente 2 places coincées entre 2 couples clopant et en pleine discussion.
La soirée démarre bien.
Elle se poursuit sur un rythme léger malgré la teneur de mon assiette : des joues de porc plus sèches que les testicules de Jésus lorsqu’on l’a descendu de la croix, comme dirait Mel Gibson. On parle de tout et de rien et de fil en aiguille on décide d’aller prendre un verre à coté à " La folie en tête ", un petit bar alternatif surpeuplé les week-ends.

Mais ce soir, tout s’enchaîne à merveille et, à peine entrés, une table pour deux se libère. Miracle. Sophie m’invite et part chercher des boissons au bar.
Elle revient avec une Caipirinha et un Mojito. Elle boit une gorgée du Mojito. Elle le trouve à son goût. " Tu veux le goûter, demande t’elle ? ". " Bien sur " je réponds et j’embrasse furtivement ses lèvres.

Et là patatrac, elle marque un net mouvement de recul et les angelots qui jouaient du fifre violon au dessus de nos têtes depuis le début de la soirée s’arrêtent de jouer de la harpe. Panique à bord !
Le silence s’installe brutalement et là, comme un crétin, je reviens sur ce baiser avorté et je déclare que je suis désolé de l’avoir brusquée et que je ne pensais pas que ce geste innocent aurait tant de conséquences sur l’ambiance de la soirée. Bref je suis pathétique ! Comme elle n’est pas en reste elle me dit, les larmes commençant à perler sur fond gris bleu, qu’elle ne comprend pas pourquoi quand un homme et une femme passent une soirée agréable en toute camaraderie il faut qu’il y ait une tension sexuelle et qu’il faut fatalement qu’un des deux fasse dégénérer ce pur moment de bonheur innocent.
En l’occurrence le trublion c’était moi.
Suite à cette tirade, et toujours aussi troublée, elle ajoute qu’elle sort d’une aventure longue et décevante puis d’une autre brève intense et chaotique et qu’elle n’est pas prête à s’investir de nouveau avec un homme etc etc… puis elle se lève et va essayer les toilettes à la turque. C’est d’ailleurs assez drôle comme coïncidence. J’ai vu quatre fois Sophie et à chaque il y avait soit des toilettes à la turque (comme au Temps des Cerises) ou à l’ukrainienne, style Tchernobyl. Ca doit être un signe quand une relation démarre de la sorte, non ?
A son retour du Bosphore, j’ai les idées plus claires et je suis décidé à reprendre les affaires en main, à faire rejouer le petit orchestre ailé.
Je rassemble donc mes plus belles formules et j’explique à Sophie que le baiser était un acte spontané, que je passais une très agréable soirée avec une femme séduisante et je me suis lancé sans réfléchir. C’était peut-être une erreur mais ce baiser était juste un moment dans le temps. Peut-être n’y aura t’il rien après ce baiser comme peut-être sera ce la première pierre d’un édifice. Demain il sera peut-être déjà oublié, ou non. Il est léger.
Mes paroles doivent paraître sincères, et elles le sont, et elles ont le pouvoir de rassurer et de calmer Sophie. L’atmosphère se détend à nouveau. Un nouveau Mojito et une nouvelle Caïpirinha atterrissent sur les tables. Les conversations sont lestes. Elle me parle de ses soutiens-gorge taille A et moi de la dermato qui m’a déshabillé avant-hier (c’était pour localiser un kyste !).
La cloche de " La Folie en Tête " retentit. Dernière tournée et 2 nouvelles boissons vont alimenter nos bavardages avant la fermeture du troquet.
Le troquet ferme.

Nous marchons vers place d’Italie afin d’attraper un taxi … ou 2 taxis ?
Pendant que je réfléchis à la stratégie qui me permettra de faire diminuer le chiffre d’affaire de Taxi G7, je continue de la faire rire en essayant de lui faire croire que je suis un grand timide.
Arrivé à la station de taxi, je reprends ma respiration. Je lui souhaite de bonnes vacances. Elle en fait de même (elle part skier dimanche et moi je décollerai le même jour en Italie). Je lui dis que j’ai passé une super-soirée.
Elle en fait de même.
Et puis je comble les 40 cm d’altitude qui nous séparent et je l’embrasse franchement.
Elle en fait de même.


…à suivre.

LA FEMME PARFAITE ? 2/4


Samedi

Le deuxième baiser de Sophie est plus crispé. Je suis déçu car il n’y a pas de magie, pas de perfection. Il y aura donc 2 taxis et Sophie rentrera seule à Nation. Chose pensée, chose faite.
De retour chez moi, je suis énervé et déçu de la conclusion de cette soirée en queue de poisson. Je bois quelques bières suivies d’un whisky en comatant devant un match de Basket NBA diffusé sur C+ et je pars me coucher, vers 4H00, bourré et bougonnant.

Le téléphone me réveille vers midi. Je décroche la tronche enfarinée. Aurélie. Une ancienne collègue, de l’époque où j’étais consultant à la Société Générale, jolie, vive d’esprit quoique très conservatrice et connotée bourgeoisie locale, avec qui je dois partir faire une semaine de tourisme en Italie le lendemain. Ceci en vertu d’un “ gentleman agreement ” qui nous permettra de gérer au mieux cette situation de concubinage en toute camaraderie. Enfin on verra bien sur place …
Elle m’informe qu’elle sera dans le quartier vers 14H00 et me propose de prendre un café afin de discuter des dernières modalités du voyage. J’accepte et de ce fait il me reste moins de 2 heures pour me mettre dans le sens de la marche.

Arrivé au café, rue du Commerce, entre 2 sourires charmeurs au garçon de café, Aurélie étale un grand nombre de guides touristiques sur Rome, Bologne (notre aéroport d’atterrissage) et la Toscane. Elle semble avoir déjà planifié le voyage. Ca commence bien ! Elle a également décidé que nous irions à l’aéroport en bus et que pour cela il faut nous retrouver à Opéra à 10H00 demain matin. Je n’aime pas le bus. Ca continue très fort. Comme je lui rappelle, que je fête les 30 ans d’une copine (Vanessa) ce soir avec sortie en boîte à la clé, elle fronce les sourcils et précise qu’elle m’appellera demain à 9H00 histoire de confirmer la sonnerie de mon réveil. Ca se poursuit dans un état d’esprit toujours aussi serein. Je la rassure néanmoins en précisant que je serai raisonnable et que je serai couché pour 3H00, tout en sachant au fond de moi que comme il y aura désormais 2 sonneries de réveil, il y aura 9 chances sur 10 pour que je sois déraisonnable et que je ne m’impose aucun couvre-feu.

Après 2 cafés serrés nous nous quittons en nous donnant rendez-vous le lendemain matin et je réalise que, toute jolie qu’elle soit, je n’ai plus trop envie de survoler les Alpes en sa compagnie.
Du coup je poursuis l’après-midi par une séquence de shopping compulsif rue du Commerce histoire de calmer mon angoisse. Je craque pour un perfecto tout en étant à 2 doigts d’emballer la vendeuse dans le mouvement, une black rondelette avec des lentilles de contact bleues. Puis je vais acheter une bonne bouteille de champagne, pour un apéro programmé en début de soirées avec d’ex collègues, période IBM cette fois, alors qu’un pack de 16 aurait suffi à leur bonheur.
Je rentre chez moi plein d’entrain, commence à préparer mon sac de voyage, m’affale sur le lit et m’endors. Le téléphone me réveille à nouveau. Certains jours je m’estime chanceux que des gens m’appellent pour limiter mes heures de sommeil. C’est Vanessa. A la fois stressée et pompette, elle m’invite à être ponctuel au Cabaret, un resto-club “ hype ” place du Palais-Royal à 21H30. Là-bas on ne plaisante pas avec les horaires de réservation précise t’elle. Je regarde ma montre : 20H00 ! C’est pas ce soir que la bouteille de champ’s sera attaquée. Pas d’apéro IBM.
J’enfile mon perfecto nouveau et direction Cabaret.

Arrivé sur place à l’heure prévue je commence à prendre la mesure du traquenard qui m’attend.
Le Cabaret est un endroit branché au décor propre et fade, probablement créé par un architecte Finlandais. Des serveuses à la plastique irréprochable mais aussi froides que les tables en aluminium qui les entourent et aussi maquillées qu’une voiture volée. Bref tout ce qu’aimerait Fabien, ex-roi de la nuit, mais tout ce que je déteste : ce n’est vraisemblablement pas dans ce genre d’endroit qu’on peut embrasser une fille en écoutant du Pierre Bachelet (…je m’expliquerai dans le 3ème chapitre sur ce point). Deuxième constatation il n’y a pas de réservation au nom de Vanessa et, après que le physionomiste m’ait longuement dévisagé, je suis autorisé à descendre au bar du sous-sol pour essayer de repérer des visages connus.

Arrivé au sous-sol, je me dirige vers le bar, également désigné selon toute probabilité par un Finlandais, mais cette fois-ci à tendance gothique, et c’est ici que je reconnais Julie, une amie de Vanessa, magnifique femme brune d’1m80 au physique de modèle, professeur d’histoire-géographie en lycée, récemment divorcée. Elle vient à ma rencontre, me salue et dit : “ Je parie que tu ne te souviens plus de mon prénom ! ”. “ Non, pas du tout, Julie… ” et je me retiens d’ajouter “ …même un moine gay et amnésique s’en souviendrait. ”
Elle se lance alors dans un long monologue plein de stress pour m’expliquer que l’organisation est complètement catastrophique ce soir, que nous n’avons pas de réservation et qu’on va galérer pour dîner à une vingtaine de personnes dans le quartier, que Vanessa n’est toujours pas là, alors qu’elle nous a expressément demandé d’être ponctuels et qu’en plus quand elle lui a parlé au téléphone, elle avait l’air complètement stone et que quand elle était petite c’est sa maman qui organisait les anniversaires de Vanessa et qu’au moins c’était bien fait etc...
Ouffff !

A ce moment là je me suis demandé si le doublement du chromosome X, doublait aussi les facultés organisationnelles. Alors je me suis alors dirigé automatiquement vers le bar pour commander une bière, j’ai sympathisé avec Ralf, un Allemand de la Weser, et par dépit j’ai parlé football et du pied gauche de Johan Micoud.
Vanessa est finalement arrivée à la 2ème bière alors qu’on en était à parler des chances la Tchéquie à l’Euro2004, pour constater le marasme organisationnel. Elle avait l’air effectivement éméchée car elle était super-heureuse que je lui offre un DVD de “ La Tour Montparnasse infernale ”.
Les choses s’arrangent en partie lorsque le staff du Cabaret nous dégotte une table pour 14 alors que nous sommes 18. Les négociations s’engagent alors pour les 4 places restantes. Comme la population des amis de Vanessa, très en harmonie avec le décorum local pour la plupart, ne me séduit guère et que je n’ai pas envie de passer trop de temps dans cet endroit je propose d’aller manger un poulet-frite à coté avec 3 autres personnes. De préférence avec une majorité de jolies filles, ajoutai-je par voie télépathique.
Ma solution semble retenir l’intérêt de Julie, prête à se sacrifier pour sauver le dîner d’anniversaire de sa copine, de Marine, une amie d’enfance de Vanessa, que j’ai brièvement connue à Tokyo et de Sofia, une amie Londonienne de Marine.

Mon vœu est donc exaucé à 100% et alors que nous nous dirigeons vers la sortie le chef de rang nous informe qu’il vient de nous trouver une table pour 4 à l’étage.
Nous nous attablons donc et je constate à nouveau, avec plaisir et avec la fierté du coq de basse-cour, que je suis entouré de 3 jolies femmes qui commencent à se détendre. Cette situation n’est que provisoire puisque Marine a appelé une amie Russe, Héléna, qui débarque quelques minutes plus tard et vient s’installer à ma gauche assise, sur un tabouret.
Cette soirée, au démarrage poussif, s’engage de mieux en mieux d’autant plus que je me retrouve maintenant pris en plein milieu d’un “ dîner copines ”.

Après la 1ère bouteille de Pouilly Fuissé LaDoucette, le débat s’anime sérieusement. Tout d’abord avec ma voisine de droite, Sofia, très jolie femme aux cheveux châtains courts, yeux noisettes et perçants, sourire ravageur et qui s’occupe d’éco-tourisme.
Bien qu’elle parle un Français quasi-parfait, je m’étonne qu’elle ne connaisse pas certaines expressions françaises clés tel que “ happy-hours ”. Elle m’avoue alors qu’elle est Italo-suisse.
Coïncidence, ou presque, je lui dis que je pars demain en Italie.
“ - Où ça ? me demande t’elle
- Rome - Génial. J’ai grandi à Roma. C’est une ville magnifique et incroyablement romantique. Tu pars seul ?
- Pourquoi cette question ?
- Parce que si tu pars en couple, tu vas succomber et en revenir follement amoureux. Alors tu pars seul ?”
Au vu de ce que j’avais expérimenté dans l’après-midi j’avais de sérieux doutes sur ma prédisposition au romantisme Romain. J’hésite sur la réponse à donner. Info ou intox ? Info : je réponds d’un “ non ” hésitant à sa question.
Elle insiste.
“ - Tu pars avec ta copine ou ta fiancée ?
- Pas vraiment, dis-je toujours hésitant … ”
Sentant que j’ai piqué sa curiosité et pour devenir encore plus intéressant, je choisis spontanément l’option intox et je sors :
“ - En fait je pars avec une ex-copine. On a acheté les billets depuis longtemps et on a décidé de partir malgré notre rupture.
- Tu es sur de ce que tu fais ? Si tu pars avec ton ex, je suis sure que vous allez vous remettre ensemble à Rome. Mais peut-être que c’est ce que tu cherches. Rome, c’est le cadre idéal pour ça. D’ailleurs je te parie que tu reviens follement amoureux d’Italie.
- Tenu ! je réponds. Qu’est ce qu’on parie ?
- Un poulet-frite, claque t’elle avec a propos. ”
Excellente idée et en plus, une fois revenu de la ville éternelle, ça me donnera une occasion potentielle de rester en contact avec cette femme qui captive toute mon attention.

On s’en donne donc cinq et mon attention bien qu’attirée sur ma droite se porte alors brusquement sur les trois autres “ copines ” qui ont commencé à parler “ mecs ” sous l’impulsion d’Héléna.
Héléna est une slave (donc blonde) bien en chair, violoniste de son métier, qui se la joue mangeuse d’homme.
Elle a commencé depuis quelques minutes à raconter son existence romanesque du style : “ Mon précédent mec, c’était un pianiste très célèbre en Russie. On s’est rencontré dans une soirée à L.A. Il a flashé sur moi et réciproquement. Voyant cela, il m’a dit que j’avais 5mn pour me décider à le suivre à l’aéroport et prendre un avion pour Miami. J’ai dit BANCO. Arrivée là-bas ça a été l’amour fou jusqu’au jour où il m’a annoncé qu’il s’était fait ligaturé les trompes des testicules (sick). Il ne voulait pas d’enfants. Je l’ai quitté. ”
Et puis elle continue en assénant : “ Je suis amoureuse de mon mari. En plus il est riche et il baise bien. Mais si un jour le sexe ou l’argent vient à manquer je vais voir ailleurs. Sans nécessité de divorce, bien sur, si c’est juste une question de sexe. ”
Cruauté de la nature féminine…surtout en Europe de l’Est suis je en train de penser. En fait Julie, enhardie par les propos d’Héléna, me fait découvrir que je pense mal. Elle nous raconte la richesse de sa vie sentimentale du moment : “ Je suis avec un mec très riche en ce moment.
Je ne suis pas très amoureuse mais il me gâte tellement que ça me convient tout à fait. Le week-end dernier, il m’a emmené en week-end à Courchevel. Chambre d’hôtel à 640€ la nuit. C’était génial. ”
Marine qui branchait un pianiste, collègue d’Héléna qui était au bar de la disco du Cabaret, au moyen de SMS plus crus les uns que les autres, lève la tête et ajoute en souriant : “ C’est pour ça que tu as envoyé ce SMS à tout le monde la semaine dernière. Ca disait : 640€ la chambre, qui dit mieux ? ”.
Les femmes sont peut-être tout aussi vénales en Europe de l’Ouest pensais-je et la beauté de l’âme féminine telle qu’elle était dessinée dans mon esprit commençait à s’assombrir peu à peu à lumière de ces discours.
Et bientôt, ce qui allait s’effriter c’était mon espoir de voir naître une petite idylle de cette soirée.

En effet, Marine émerge définitivement de son GSM et commence à traquer Sofia : “ D’ailleurs toi aussi Sofia tu devrais aller voir ailleurs et te trouver un amant. Je suis sure que ton mari te trompe lors de ses incessants déplacements à Amsterdam. ”
Mariée !
Une fille qui ne porte même pas d’alliance. Décidément de nos jours la signalétique part à vau l’eau. Cette révélation me porte un coup fatal et pendant ce temps là Sofia se défend mollement : c’est juste une petite crise normale après 4 ans de mariage.
Ce moment marquera un tournant de la soirée.

La 2ème bouteille de Pouilly Fuissé étant sur le point de se terminer, les conversations du repas s’essoufflaient, Vanessa et Noriko étaient venues gonfler la population féminine, mais Helena m’avait relégué sur le tabouret à la défaveur d’une excursion aux toilettes, le dessert s’était révélé médiocre, Julie était partie prématurément pour cause de baby-sitter peu noctambule et l’addition s’était avérée aussi salée que le plat du jour.
Nous redescendions donc, elles et moi, au sous-sol direction la discothèque et le dance-floor pour elles et le bar ou la table garnie de vodka et tonic pour moi.
Puis, devant le manque de conversation de mes voisins désormais trop bourrés pour parler foot, je décide d’aller gigoter à mon tour sur la piste. La musique est naze. De la techno, style café Coste, Helsinki mix. La piste est remplie de top-models, siliconées pour les unes et gominés et body-buildés pour les autres. J’ai l’impression d’être au milieu d’un mauvais clip M6 Music.
Je me décourage au bout d’1/4 d’heure et pars faire le tour du club histoire de rencontrer quelqu’un.
J’ai l’impression d’être seul dans toute cette foule si différente.
Finalement je tombe sur Noriko, pas en grande forme. La preuve elle m’offre la fin de son whisky-coke. Je le descends d’un trait. Je regarde ma montre. 2H00. Je me dis qu’il y aura finalement un couvre-feu ce soir.
Je décide de faire un dernier tour de Cabaret, dans le sens inverse cette fois, histoire entre autre de retrouver Vanessa et de la saluer avant de sauter dans un autre taxi.
Le taxi du dimanche matin, succédant au taxi du samedi matin.
Encore une soirée qui risque de se terminer en queue de poisson.


A suivre…

LA FEMME PARFAITE ? 3/4


Sofia

Je suis donc prisonnier du Cabaret alors qu’il est a priori si facile d’en sortir, un peu comme dans le film " Clubbed to death".

Plutôt bien décidé à continuer de m’arsouiller je retraverse la piste de danse pour me diriger vers le bar et j’aperçois Sofia en train de danser, très sensuellement, dans une transe douce, sans doute un peu ivre elle aussi. Je m’arrête, danse brièvement à coté d’elle et puis je lui dis que je vais prendre un verre au bar. Elle me répond : " Je t’invite. ". Je ne cherche même pas à résister à une telle offre !
Arrivé au bar elle me demande ce que je prends. Je dis " Gin-tonic ". Je pense qu’avec le Pouilly, la bière, le whisky-coke et la vodka-tonic ça fera un chouette mélange. Elle me répond : " T’es fou ! Fais pas ça ! Ca rend dépressif !". " Ah bon ? Ben, un cuba-libre alors ". De toute façon j’avais pas encore essayé le rhum ce soir.
J’ai ben aimé cette répartie inattendue et tellement appropriée à une conversation de zinc. Je suis assurément sous le charme et nous trinquons. Sofia propose le toast :
- A ton futur mariage !
- Pardon ?
- Ben, oui tu vas te marier en revenant d’Italie. C’est sur. Je te l’ai déjà dit c’est tellement romantique que tu ne pourras pas résister et si Roma ne suffit pas, ce qui m’étonnerait, pars donc faire un tour en Toscane. C’est juste à côté.
- T’en es vraiment sure ?
- Certaine ! "
Je bois une gorgée de Cuba-Libre, elle m’offre une cigarette, que je prends. Mes mains tremblent. Je me lance quand même.
" - Donc, je lui dis, si tes prévisions sont exactes et comme je pars demain matin, ce soir c’est ma dernière soirée de célibataire.
- Très certainement, murmure t’elle
- C’est dommage il y a tant de choses que je n’ai jamais faites et notamment une …
- Laquelle ?
- Je n’ai jamais embrassé de femme mariée. Enfin pas que je sache …
Rires de la Belle ; elle rétorque, sourire charmeur, au coin des lèvres :
- Tu penses à Helena, la belle Russe ?
- Non à toi. "
Je me rapproche. Elle ne s’éloigne pas et je comble les 14 cm de distance quasi-horizontale qui séparent nos lèvres. C’est un joli baiser très sensuel et très adolescent aussi vu qu’on est en boîte au milieu de 500 personnes. Le contact est établi.


Nous sommes très prêts l’un de l’autre. La discussion se poursuit. Nous nous embrassons à nouveau. Je m’enhardis. Toujours plus.
" Sofia, je t’invite à venir chez moi. Helena avait 5mn pour se décider à faire Los Angeles-Miami avec son virtuose. J’habite dans le XVème. C’est moins loin. Donc tu as 10 secondes pour te décider. "
Elle proteste. 10 secondes c’est trop court. Elle veut 5mn de réflexion elle aussi. Accordées. Nous rions de mes méthodes expéditives de dragueur style Macumba Night. Puis elle fouille ses poches et en ressort un papier froissé et me demande : " C’est un ticket de vestiaire, non ? ".
Yessssss ! Je m’occupe de l’intendance, récupère sa veste en jean et mon perfecto tout neuf et nous voilà dehors. Je tente de héler un taxi mais Sofia m’arrête : elle veut marcher.


Nous nous éloignons du Cabaret, côte à côte, en continuant à parler. Surtout moi. Je suis nerveux. Je lui parle du Louvre, du Carrousel, du Quadrige de la place St Marc au fur et mesure que nous passons devant ces monuments. Puis nous longeons la Seine. Elle me mime une ou deux prises de self-defense et je l’entraîne par-dessus la Seine sur une passerelle que je crois être la passerelle St André des Arts (en fait je m’apercevrai 3 semaines plus tard que je me suis planté de passerelle. C’est pas grave.). Au milieu du pont nous nous arrêtons. Nous admirons les monuments qui nous entourent et nous nous enlaçons. Les mains s’égarent sous les pulls. Elle m’explique que le toucher est la sensation la plus agréable et la plus importante et je suis à 100% sur la même longueur d’onde. C’est un moment de pur bonheur. Plus que l’impression de poser ma main sur la lune, j’ai l’impression de poser pour Doisneau. C’est en effet un sacré cliché ce que je raconte là mais je crois que c’est mon plus beau baiser parisien, loin devant un premier baiser échangé il y a quelques années, au " Merle Moqueur " un bar de la Butte aux Cailles, avec " Au Nord c’était les chorons " en fond musical.
Après ces quelques minutes de pose extatique nous redémarrons. Je la convaincs d’intercepter un taxi. Dans le véhicule, nouvel épisode intéressant. Elle me parle de " L’insoutenable légèreté de l’être " son roman favori. Mon roman fétiche c’est " La plaisanterie " du même auteur. On passe le trajet à parler de Kundera. Un petit interlude cérébral dans la soirée.
6 rue François Mouthon. Nous sommes rendus chez moi. Elle trouve que l’appartement a du charme comme tous les vieux apparts parisiens et s’installe dans le canapé. Je pars chercher 2 flûtes, pour la musique de chambre et une bouteille de champagne dans le frigo, rescapée d’un apéro avorté.
Elle est ravie de ma trouvaille, le bouchon saute, nous portons un toast, nous nous enlaçons à nouveau et au bout de quelques minutes elle me demande si j’ai un lit.
Il est 3H30.


Arrivés dans la chambre les vêtements volent assez rapidement. Je n’avais même pas remarqué qu’elle ne portait pas de soutien-gorge. C’est dire mon trouble ! Elle a un corps superbe. Mince, athlétique et très féminin en même temps. Elle a une peau très fine, tatouée d’une rose au niveau de l’aine. Elle veut que je ferme les yeux pour me focaliser sur le toucher. Je transige et nous éteignons la lampe de chevet.
S’en suivra un orgasme total et long. Hyper-agréable. Une complicité inimaginable de la part d’une personne que je connais depuis à peine quelques heures.
Les étreintes se poursuivront à plusieurs reprises. Durant les pauses nous discutons. Elle me parle de l’Italie, des minets Romains, de ses 8 frères et sœurs ( ?), de sa mère Chinoise et par enchaînement logique de ses petits seins preuve de ses origines chinoises. Elle me dit qu’elle n’est pas mariée. Je m’étonne. Non c’est une blague. Elle me parle de son job d’avocat d’affaire chez Ashurst qu’elle a quitté par dégoût du capitalisme à l’anglaise. Elle est très vive et intelligente. Elle s’attaque à la psycho maintenant. Me parle du complexe de supériorité phallique des hommes et se gratte la tête. Je lui demande si elle sait pourquoi elle se gratte la tête. Elle me regarde étonnée et me dit que non. Je lui réponds que c’est parce qu’elle n’a pas de couilles.
Aïe. J’ai merdé…
Pas du tout. Elle éclate de rire et me dit " Pas mal pour 5H00 du mat’ !!". Elle m’embrasse, se jette sur moi et m’entraîne par terre. Elle veut faire l’amour sur le plancher. Là je ne suis pas trop d’accord et manifeste mon opposition en débandant … pour la 1ère fois depuis 4 heures. La raison : ça fait mal aux genoux et la voisine du dessous est une dame qui a la cinquantaine qui a sa chambre juste en dessous de la mienne et qui vient de perdre son mari. Elle m’a déjà demandé de faire moins de bruit il y a quelques mois. Je me sens un peu coupable et j’explique la raison de mon désintérêt à Sofia, en omettant bien sur la partie relative au mal de genou.
Elle se jette dans mes bras, en se me serrant affectueusement et en me disant que c’est bien d’être attentif. Elle m’explique que son père est mort il y a 7 ans et que ça mère a toujours du mal à trouver le sommeil. Elle est triste et retient une larme dans mes bras.
C’est incroyable toute la palette d’émotions que nous pouvons ressentir en une seule nuit. Nous refaisons l’amour de manière très intense et nous reposons allongés mais toujours éveillés.
Il est près de 6H00, le jour se lève annonçant la fin de la balade et amenant ainsi une certaine tension. Je prends conscience que tout ceci est en train de finir et, dépité, je lance une banalité : " Tout ça est à la fois très bien et très mal fait.".
Elle se retourne vers moi et me répond doucement : " Il faut que tu m’oublies ".
Ne plus la revoir à la rigueur, mais l’oublier serait impensable voire inimaginable. Je lui explique donc qu’il est hors de question que je fasse un reset mémoire. Elle essaie de me convaincre du contraire puis renonce assez rapidement.
Mais cette perspective de séparation dans quelques heures voire quelques minutes m’affecte de plus en plus au fur et à mesure que les minutes s’égrènent. La fatigue me gagne progressivement en même temps que la nervosité. Je commence à raconter des choses débiles, à inventer un système qui ne fonctionnera jamais pour s’échanger clandestinement des e-mails. J’étais même à 2 doigts de lui dire que j’avais déjà voté communiste.
La nervosité étant communicative, toutes les 10mn elle me fait part de son projet de départ imminent.
A posteriori, je pense que ce type de scenario est un grand classique des " one night stand " et donc comme on pouvait s’y attendre Sofia se met en branle vers 7H30.
Son départ s’effectue très rapidement. Une douche rapide. Pas de café. Des vêtements rapidement enfilés.
Mais toujours, malgré la fébrilité du départ, je remarque ses gestes gracieux, ses sourires fatigués et surtout le tranchant de ses réparties malgré l’heure matinale. Par exemple alors qu’elle se rhabille elle me lance charmeuse : " T’es bizarre comme type, je portais un string et t’as rien remarqué. "
Tout juste ! J’étais tellement fasciné par cette fille que je n’avais même pas remarqué qu’elle ne portait pas de soutif et a fortiori j’étais loin de m’apercevoir de quoi que ce soit concernant le string.
Ca ne faisait que confirmer ce que je pensais. C’était bien elle la femme parfaite puisqu’elle portait un string.
J’ai à peine le temps d’achever cette pensée très profonde qu’elle est déjà sur le pas de ma porte.
Juste le temps de sortir sur le paillasson dans un caleçon défoncé motifs treillis, de lui donner un bouquin (" confession sexuelle d’un anonyme russe " référence à une de nos discussions de la nuit concernant Helena et la sexualité chez les soviets), de nous étreindre et nous embrasser une dernière fois avant de la voir disparaître dans les escaliers en me faisant signe de la main.
Je referme la porte.
C’est fini.
Je réalise à peine ce qui vient de m’arriver mais je sais que je viens de vivre un des meilleurs moments de mon existence.
Je l’ai rencontrée.
Je n’ai plus sommeil. Ca tombe bien, dans 2 heures je dois prendre un bus du côté d’Opéra…

A suivre…

LA FEMME PARFAITE ? 4/4


Suite et fin ?

J’ai retrouvé Aurélie à 10H00 tapante en face d’Opéra. Je n’avais pas dormi de la nuit mais j’allais me rattraper et m’endormir partout où c’était possible: bus, aérogare, avion, train.

Arrivés à Rome nous nous sommes présentés en couple dépareillé et à moitié ensommeillé chez François et Valérie, des amis qui, ex-expatriés en Asie du Sud-Est, sont tombés follement amoureux de Rome et s’y sont installés avec Philomène, leur fille de 9 mois. Valérie confessera d’ailleurs à la fin du séjour qu’elle nous a trouvé très distants comme couple. Elle n’avait vraiment pas de mérite tellement j’étais loin. Très loin.

Pendant les jours qui suivirent, jamais les pleurs de Philomène ni la présence d’Aurélie dans le futon ne troublèrent mon sommeil profond et lorsque j’avais les yeux ouverts mon accompagnatrice me fit quelques fois cette remarque : " Ca va ? Tu as l’air absent ".
Effectivement durant 3 jours, mon horloge interne était restée bloquée sur dimanche vers 3H33 du matin.
Le 4ème jour, soit le mercredi, mon humeur était redevenue égale mais à partir du jeudi Aurélie a commencé à m‘insupporter en rentrant désormais dans une logique de conflit systématique et en tentant de diriger de plus en plus la manœuvre question tourisme.
Etait elle vexée de mon attitude des premiers jours ? Certainement. Aussi, me sentant un peu coupable, je décidais de la jouer profil bas mais entre elle et moi les périodes de quartier libre allaient se multiplier notamment à Bologne où nous étions revenus à partir du vendredi.

Ainsi le samedi, alors que j’allais déjeuner seul dans une trattoria et je décidais de célébrer à ma manière l’hebdoversaire de ma rencontre avec " la Femme ", qui n’était pas si parfaite car en fait je lui avais trouvé au moins 2 défauts : mariée (avec un autre que moi s’entend) et infidèle. Mais la combinaison de ces 2 défauts ne me dérangeait guère….
Je trouvais donc un stylo, arrachait une page d’un magazine et me mettait à gratter le papier:
" Je t’écris quelques lignes pour te raconter une semaine Italienne, passée entre Rome et Bologne, et pour te laisser deviner ce qu’il va advenir du poulet-frite.
Tout d’abord je reconnais que tu as raison concernant Rome et la magie que peut dégager cette ville. Tout ici semble pousser à l’exaltation et à la déclaration amoureuse : les formes des pattes, le coucher de soleil en haut du Castel San Angelo, les ruelles du Rione Monti, les temples d’Aphrodite et le Mont de Vénus, les baignoires de la Piazza di Spagna, lo Ratti do Sabini, les petits seins de Paolina Borghese, qui pourtant n’avait pas d’ancêtres chinois.
Seulement, n’étant amoureux que de Rome et pas de ma compagne, je n’ai rien exprimé. J’ai même trouvé un peu frustrant de ne pas pouvoir exploiter un tel environnement pour laisser courir mon cœur et j’ai baissé le rideau de fer au fur et à mesure que la semaine passait.
Pas question donc d’aller déclarer ma flamme au sommet du Monte Mario cette fois-ci. D’ailleurs on me l’a déconseillé car en haut il n’y avait, parait-il, pas de point de vue. Rien qu’un Hilton et une base militaire. La belle affaire ?
Pas question non plus de faire escale en Toscane, sur le chemin du retour, dans un village charmeur à l’ombre d’une tour penchée du XVème siècle. Trop difficile. Le voyage Toscan en amoureux a donc été reporté sine die.
A la place un trajet en train direction Bologne, ses twin-towers, ses palais en briques, ses tortellini romagnols, ses osteria et ses étudiants anarchistes. J’ai d’ailleurs passé ma dernière soirée là-bas à discuter avec un chercheur en sociologie d’une quarantaine d’années de l’intégration de l’immigration dans l’Italie du XXIème siècle avant de rejoindre mon letto gemello. Parfaite conclusion de la journée Bolognaise et de ma semaine italienne.
Donc je pense que tu as conclu toi-même : tu as perdu ton pari.
Mais je voulais te dire aussi qu’à partir du moment où tu as fait un stop dans le 14ème arrondissement, ce pari s’engageait mal pour toi. Pour m’expliquer rapidement et sans rentrer dans les détails, je dirais qu’il m’était très difficile, après une nuit de Mozart live, de passer une semaine à n’écouter que du Richard Clayderman…surtout sans avoir dormi une minute pour essayer de faire une sorte de transition.
J’espère donc te revoir un de ces jours pour un poulet-frite, un concerto ou une petite musique de chambre, piu forte ma non troppo.
Au choix…
"
Je range ce résumé de ma semaine dans la poche arrière de mon jean et le lendemain nous prenons l’avion du retour.

De retour à Paris, je téléphone à Marine car, comme un couillon, je n’avais aucun moyen de contacter Sofia à qui je souhaitais envoyer ma prose. Marine décroche. Elle est en train de skier en Pologne, en toute simplicité, et m’annonce, radieuse, qu’elle est follement amoureuse de son pianiste, que la vie est géniale et qu’elle transmettra ma requête vers la capitale Anglaise.

Le lendemain matin, je suis en formation à l’ENST Paris sur " L’application de l’induction électromagnétique à la technologie de la carte à puce sans contact ". Et comme on est en fin de matinée et comme le titre de la formation l’indique je suis en train de m’endormir.
Une vibration m’extrait de ma torpeur. Je viens de recevoir un SMS … d’Angleterre. " Tu me cherches ? ". Je joue au naïf et au teenager et je réponds " Céki ? ". La réponse tombe rapidement : " Quelqu’un qui te doit un poulet-frite ". Je souris. Je relève la tête. Perdu !
La jeune professeur, plutôt mignonne malgré son tailleur rose fuschia et une moustache ostentatoire, agrégée de physique soit dit en passant, est plantée devant moi et elle vient de détecter mon manège. Y’a pas à dire, d’une part je l’ai vraiment joué à l’adolescent qui dragouille en cours et d’autre part les jeunes profs se sont bien adaptés à l’évolution de certaines technologies.
Bon, j’ai l’air un peu bête et je range mon mobile mais ce n’est que partie remise car cet après-midi je ne me la joue plus teenager mais étudiant INT : je fais sécher les 3 heures de formation.
Sitôt après déjeuner j’appelle Sofia. Elle est chez elle. Je me réfugie dans le hall d’un cinéma. Je suis extrêmement nerveux et carrément nul et crispé au téléphone. Elle me pose des questions sur Rome. Je ne lui donne pas de réponses mais je lui indique que j’ai déjà tout écrit et qu’il me faut son adresse e-mail.
Elle me la communique et de retour chez moi je lui envoie un courriel, auquel elle répondra ceci quelques jours plus tard :
" J'ai donc perdu mon pari a cause d'une promenade nocturne Parisienne et je suis désolée que tu n'aies pu laisser s'exprimer le cri de ton coeur au son de la Fontana di Trevi (ni d'ailleurs du Monte Mario... c'est une belle affaire, je te l'assure, il suffit néanmoins de savoir ou se placer pour la vivre). Désolée aussi pour la flamme d'un coeur qui s'est éteinte et beaucoup pour cette ville que j'imaginais magique, capable de faire repartir une certaine envie vers une nouvelle passion à travers toutes ces choses qu'elle nous fait vivre alors qu'on se laisse perdre dans ses ruelles infinies, remplies d'anciens paliers qui invitent le baiser vole et le toucher inattendu, son histoire parfois cruelle et ses déclarations si souvent irrationnelles.
Mais ce n'est la qu'une désolation causée en partie par le désir de l'idéal et une imagination méditerranéenne. Et si nous en venons à parler de poulet-frite et de promenade nocturne, alors je dois t'avouer que cette perte d'idéal pourrait se laisser assoupir pour un instant a l'idée d'une âme retrouvée, quelque peu affamée de choses simples mais délicieuses.
Sofia
"


Bref, c’est le genre de message qu’on savoure en le relisant 5 ou 6 fois, histoire d’être bien sûr d’en avoir saisi toutes les nuances. Ces propos ont un arrière-goût de nos conversations nocturnes même si je suis surpris qu’elle ait autant fantasmé sur la sentimentalité liée à mon périple Italien. Je la retrouve l’espace de 13 lignes.
Bien sur ma réponse est la suivante : je veux être ton fournisseur en choses simples et délicieuses.
En retour je reçois un SMS qui dit la chose suivante : " L’âme retrouvée c’est la tienne. Merci pour l’offre. A revoir lors de mon prochain passage à Paris. "
Nous sommes désormais début avril et depuis quelques semaines, aucune nouvelle de la belle. J’ai écrit ces quelques pages, histoire de me nettoyer le cerveau comme j’avais peut-être déjà tenté de le faire dans la Trattoria Bolognaise.

Durant cette période j’ai aussi nettoyé ma vie de ces quelques histoires médiocres dans lesquelles je m’étais lancé sans conviction. Exit donc Sophie, Aurélie.

Aujourd’hui j’aspire à vivre une histoire d’amour forte avec une femme qui me fasse rêver.

Avec Sofia, avec La Femme ou avec une autre.